L'empreinte du construit
Récit
L'empreinte carbone moyenne d'un citoyen français est en 2023 de dix tonnes de CO². Selon les scénarios du GIEC, notre objectif est de réduire cette empreinte à deux tonnes d'ici 2050. Soit une division par 5, ce qui annonce un changement radical de société.
En tant qu'acteurs de la ville, quels sont nos leviers d’action ? Nous n’agissons que sur le milieu physique, c’est-à-dire, pour simplifier le raisonnement, sur environ un tiers de cette empreinte carbone – fonction évidemment de notre situation géographique, de la valeur de la mobilité carbonée ou décarbonée en fonction du réseau de transports en commun, etc, mais il s'agit ici d'une approche conceptuelle. En pratique, nous agissons sur le milieu physique en agissant à la fois sur la conception des bâtiments et sur les choix énergétiques que nous faisons en matière d'approvisionnement.
Actuellement, sur les opérations, nous arrivons à atteindre des réductions de carbone de l'ordre de 25 à 30 %. En admettant que nous puissions gagner 50 % sur notre tiers, nous n’obtenons qu'une réduction de 17,5 %. En arrondissant à 20 %, cela signifie que 80 % des émissions ne sont pas directement adressées par le milieu physique et échappent à notre contrôle. Or, pour passer de 10 à 2 tonnes de CO², nous devons réaliser un gain de 80 %... Cela ne signifie pas pour autant que nous devons rester inactifs. Au contraire, nous devons faire tout notre possible en tant qu'acteurs urbains, pour atteindre ces 20%. Mais parallèlement, nous devons également chercher les leviers que nous pouvons activer pour aller chercher les 80% restants. C’est à dire envisager la capacité d'engagement des habitants des lieux que nous concevons, les inciter à entreprendre leur propre transition. Ainsi, nous devons penser l'infrastructure urbaine et le logement, comme plateforme pour engager la transition.
Pour ce faire, deux pistes. Si le tiers central de l’empreinte carbone correspond au milieu physique, le tiers aval correspondant aux usages, aux comportements, aux modes de vie, à l’alimentation, etc. Nous ne pouvons évidemment pas construire des territoires habitables qui ne seraient accessibles qu’à ceux qui accepteraient de ne plu voyager en avion, de ne pas manger de viande ou encore de ne pas changer de téléphone tous les ans. Notre rôle n'est pas de dicter les comportements, mais en revanche nous pouvons encourager des comportements favorables à la décarbonation, et donner la possibilité de… consommer autrement, se déplacer autrement, travailler autrement. Nous sommes des acteurs du matériel, mais nous devons travailler autant que possible sur l'immatériel comme vecteur de changement et de transition.
Et nous pouvons également tenter d’adresser le tiers amont, qui englobe les grandes décisions nationales ou internationales en matière de politiques publiques. Comment pouvons-nous concevoir chacune de nos réalisations comme des démonstrateurs et des inducteurs ? Nous devons devenir des démonstrateurs afin d'influer à la fois les choix nationaux, les politiques publiques et les réglementations.